Covid19 | Délais d’approbation des comptes et modalités des tenues des AG : les nouvelles dispositions temporaires
Dans le cadre des mesures de lutte contre la propagation du Covid-19 et notamment des mesures de confinement et d’interdiction des rassemblements, des dispositions exceptionnelles et temporaires ont été prises par le Gouvernement ayant pour objet d’adapter :
- les délais de convocation et de réunion des assemblées d’approbation des comptes annuels des sociétés (et de manière générale, de toute les personnes morales et entités dépourvues de personnalité morale de droit privé) ;
- les modalités de tenue des assemblées générales et des réunions des organes de direction de ces sociétés.
Faisant usage de l’autorisation conférée par la Loi n° 2020-290 du 23 mars 2020, deux ordonnances ont été prises le 25 mars 2020 (publiées au JO du 26 mars 2020) :
Adaptation des règles relatives à l’établissement, l’arrêté, l’audit, la revue, l’approbation et la publication des comptes et autres documents et informations (ordonnance n° 2020-318 du 25 mars 2020 [consulter l’ordonnance])
1.1 Le délai pour l’approbation des comptes par l’assemblée générale ou la convocation de cette dernière (qu’il soit légal ou statutaire) est prorogé de 3 mois. Rappelons qu’en temps normal, dans les sociétés commerciales, le délai d’approbation des comptes est de 6 mois à compter de la clôture de l’exercice, soit du fait de dispositions légales (SA, SARL), soit de dispositions statutaires (une grande partie des SAS).
Ce délai supplémentaire n’est applicable que :
- pour les comptes clos entre le 30 septembre 2019 et un mois après la date de cessation de l’état d’urgence sanitaire ;
- si le CAC n’a pas émis son rapport sur les comptes avant le 12 mars 2020.
Attention toutefois pour les sociétés cotées :
- l’ordonnance ne prolonge pas le délai de diffusion et de publication du rapport financier annuel, qui doit être publié dans les 4 mois de la clôture; en conséquence, dans ces sociétés, la tenue des organes dirigeants compétents (conseil d’administration, etc..) chargés d’arrêter les comptes et le rapport annuel ne bénéficie pas de ce délai prorogé.Toutefois « compte tenu de la situation, l’Autorité européenne des marchés financiers a invité l’Autorité des marchés financiers (AMF) à tenir compte des circonstances exceptionnelles et les entreprises à se rapprocher de l’Autorité des marchés financiers pour examiner la situation au cas par cas » (document « Foire aux questions » publié par le Ministère de l’Economie et des Finances le 26 mars 2020 [consulter le document]). A notre sens, il s’agit d’une recommandation sans force obligatoire et le délai de 4 mois précité s’impose.A cet égard, il pourra être utile, en cas de besoin, de tenir deux réunions du CA distincts, l’un pour arrêter les comptes et le rapport annuel (avant le 30 avril si les comptes sont clos le 31 décembre 2019), et un second convoquant l’assemblée (cette réunion pouvant bénéficier de la prorogation exceptionnelle de 3 mois) ;
- L’Autorité des marchés financiers a attiré l’attention des épargnants sur les modalités particulières de participation aux assemblées générales 2020 dans le contexte exceptionnel de crise sanitaire. Elle recommande aux sociétés cotées de suivre, lorsque cela est possible, certaines bonnes pratiques rappelée dans un communiqué du 27 mars 2020 [consulter le communiqué de l’AMF]. A noter, entre autres recommandations :
-
- les sociétés cotées qui souhaitent reporter la tenue de leur assemblée générale doivent en informer dès que possible leurs actionnaires par un communiqué à diffusion effective et intégrale ;
- les sociétés qui modifieraient leur proposition de dividende, sa date ou ses modalités de paiement, doivent le communiquer dès que possible.
1.2 Sous réserve des conditions visées au 1.1 ci-dessus et de la réserve précitée applicable aux sociétés cotées, le délai imparti au directoire de sociétés anonymes pour présenter au conseil de surveillance les comptes annuels et le rapport de gestion (qui est en principe de 3 mois à compter de la clôture de l’exercice social) est prorogé de trois mois (uniquement pour les comptes clos entre le 31 décembre 2019 et un mois après la date de cessation de l’état d’urgence sanitaire).
1.3 Pour les sociétés soumises à l’obligation de présenter les documents de gestion prévisionnelle : l’organe compétent (conseil d’administration, directoire, gérant, président) bénéficie d’un délai supplémentaire de 2 mois pour les établir.
Adaptation des règles de réunion et de délibération des assemblées et organes dirigeants (ordonnance n° 2020-321 du 25 mars 2020 [consulter l’ordonnance])
Les dispositions ci-après sont applicables aux assemblées et aux réunions des organes collégiaux tenues à compter du 12 mars 2020 et jusqu’au 31 juillet 2020 (sauf prorogation ultérieure par décret et au plus tard le 30 novembre 2020).
2.1 Adaptation des règles de participation et de délibération aux assemblées
- Le recours aux adaptations visées ci-après n’est possible que lorsque l’assemblée est convoquée en un lieu affecté par une mesure administrative limitant ou interdisant les rassemblements collectifs pour des motifs sanitaires (cette condition s’apprécie au jour de la réunion ou de la convocation ou de l’avis de réunion).
- Outre les autres modalités prévues par les textes qui régissent la société, il est possible de prévoir une participation ou un vote des membres à l’assemblée par une conférence téléphonique ou audiovisuelle permettant l’identification des personnes et ce, sans qu’une clause des statuts ne soit nécessaire à cet effet ni ne puisse s’y opposer.Ces derniers seront alors réputés présents pour le calcul du quorum et de la majorité (quel que soit l’objet des décisions soumises à l’assemblée).Concrètement, cela signifie qu’il est possible exceptionnellement de tenir l’assemblée générale d’approbation des comptes à huis-clos, c’est-à-dire sans que les actionnaires/associés (et les autres personnes ayant le droit d’y assister comme le CAC ou les représentants des IRP) ne soient présents physiquement.Les moyens techniques mis en œuvre doivent transmettre au moins la voix des participants, et satisfaire à des caractéristiques techniques permettant la retransmission continue et simultanée des délibérations (attention, pour les sociétés dont les statuts comportent déjà des dispositions permettant une participation aux assemblées par visioconférence ou par des moyens de télécommunication : la nature des moyens techniques admis et les conditions d’application sont celles déterminées par le décret n° 2018-146 du 28 février 2018, ayant notamment modifié l’article R. 225-97 du c.com [consulter l’article]).
- Lorsque la loi prévoit que les décisions des assemblées peuvent être prises par voie de consultation écrite de leurs membres (ce qui est le cas par exemple pour les SARL et les SNC), il peut être décidé de recourir à cette faculté sans qu’une clause des statuts ne soit nécessaire à cet effet ni ne puisse s’y opposer.Une interprétation stricte du texte pourrait amener à considérer que si la loi ne prévoit pas la faculté de recours à la consultation écrite pour la forme sociale de la personne morale concernée, cette modalité de consultation demeurerait « fermée » à cette dernière ; cependant, une telle interprétation ne nous semble pas conforme à l’esprit de la loi.
2.2 Adaptation des règles de délibération des organes collégiaux d’administration, de direction et de surveillance
Sans qu’une clause des statuts ou du règlement intérieur ne soit nécessaire à cet effet ni ne puisse s’y opposer, sont réputés présents aux réunions des organes collégiaux d’administration, de surveillance ou de direction (y compris d’arrêté des comptes), leurs membres qui y participent au moyen :
- d’une conférence téléphonique ou audiovisuelle permettant leur identification et garantissant leur participation effective,
- ou d’une consultation écrite, dans des conditions assurant la collégialité de la délibération.
2.3 Adaptation des modalités de convocation et de communication
- Les membres de l’assemblée sont avisés par tout moyen permettant d’assurer leur information effective de la date et de l’heure de l’assemblée ainsi que des conditions dans lesquelles ils pourront exercer l’ensemble des droits attachés à leur qualité de membre ou de personne ayant le droit d’y assister.
- Pas de nullité de l’assemblée si une convocation n’a pas pu être réalisée par voie postale (notamment en cas d’impossibilité, par exemple, pour la société ou ses prestataires, d’accéder à leurs locaux ou de préparer lesdites convocations en raison des mesures sanitaires).
- La communication des documents et informations préalables à une assemblée peut être valablement effectuée par message électronique.
- Pour les sociétés (cotées ou non) qui auraient déjà commencé leurs formalités de convocation, des dispositions particulières ont été prévues permettant de bénéficier des règles précitées, sans invalider les diligences antérieures (art. 7 de l’ordonnance).