Les risques associés à la continuation du mandat de Président de SAS après l’expiration du terme
Dans la pratique des sociétés par actions simplifiée, les statuts définissent librement la durée du mandat du Président. Il peut ainsi être à durée déterminée, dans quel cas les statuts ou l’assemblée en précisent la durée ou le terme ; ou à durée indéterminée. La seconde option est plus répandue dans la pratique.
Un arrêt de la Chambre commerciale de la Cour de cassation du 17 mars 2021 (n°19-14525, FS-P) est un exemple pratique qui justifie la position des praticiens du droit, souvent plus en faveur d’un mandat de Président de SAS à durée illimitée.
Dans les faits de l’espèce, l’assemblée générale d’une société avait nommé Mme X Présidente de la société pour une durée de trois ans, les statuts prévoyant que la révocation du Président ne pouvait intervenir que pour motif grave, à défaut de quoi la décision ouvrirait droit à indemnisation du mandataire.
Trois ans après cette décision de nomination, l’assemblée ne procède pas au renouvellement du mandat et la Présidente reste aux fonctions pendant une année supplémentaire, à l’issue de laquelle l’assemblée décide de ne pas renouveler le mandat.
Soutenant qu’elle a fait l’objet d’une révocation fautive dans des conditions abusives et vexatoires, la Présidente assigne la société en paiement de l’indemnité statutaire et de dommages et intérêts.
La Cour de Cassation est appelée à se prononcer sur plusieurs questions : (i) le statut juridique du dirigeant après le terme du mandat et (ii) les conséquences de cette qualification sur les droits de ce dernier.
I.Sur la qualification juridique de dirigeant de fait après le terme du mandat
Sur cette première question, la Cour de cassation répond que « la survenance du terme entraîne, à défaut de renouvellement exprès, la cessation de plein droit de ce mandat. » Cette solution n’est pas nouvelle et avait déjà été retenue pour les membres de Directoire de société anonyme et les gérants de SARL.
La Cour de cassation poursuit son raisonnement sur le point plus délicat de la qualification du dirigeant qui continue à agir mais dépourvu de mandat au sein de la société. Elle indique : « la présidente qui, malgré l’arrivée du terme, continue de diriger la société (…) devient alors un dirigeant de fait. » Cette solution a le mérité d’être plus éclairante que la solution retenue par la Cour d’appel de Paris dans son arrêt du 16 octobre 2018 qui avait retenu une « prorogation de fait » du mandat social.
II.Sur les conséquences de cette qualification
La Cour de cassation n’en profite pas pour se prononcer explicitement sur le droit ou pas du dirigeant de fait de conserver la rémunération versée depuis le terme du mandat mais indique « un dirigeant de fait, à l’égard de la société, ne peut revendiquer les garanties dont bénéficie le seul dirigeant de droit ».
Appliquée au cas d’espèce, cette solution interdit au dirigeant l’indemnisation statutaire prévue en cas de révocation sans motif grave.
La solution est donc assez brutale pour le dirigeant, mais s’explique par la raison suivante : c’est à la Présidente de fixer l’ordre de jour des assemblées et c’était donc à elle de prévoir le renouvellement de son mandat à l’expiration du terme. Cela exclut toute responsabilité des associés.
Il sera donc, sauf situation particulière, toujours préféré de prévoir un mandat du Président de SAS à durée indéterminée, ou, en cas de durée déterminée, le renouvellement automatique de ses fonctions à l’arrivée du terme.
Quentin de La Peschardière, avocat en M&A – Capital Investissement